Pascal Bridel, actuellement observateur pour l’AJ Auxerre depuis de nombreuses années, est un grand connaisseur du football. Retrouvez chaque semaine, son analyse sur le monde du ballon rond dans la rubrique « L’Âœil de Pascal Bridel ». Cette semaine, il revient sur les rencontres qui ont été reportées suite aux évènement tragiques à Paris…
C’est un peu le débat qui a enflammé les réseaux sociaux après le triste vendredi 13 que la France a connu et les reports de matchs qui en ont découlé. Quand certains étaient frustrés de ne pouvoir se rendre au stade et ont regretté les remises de rencontres d’autres n’en avaient pas le cÂœur et ont approuvé les décisions prises. Les différentes positions sont à respecter, les uns et les autres ayant des arguments.
Pourquoi jouer ?
S’il a fallu tenir compte du contexte géographique particulièrement sensible qui concernait l’île de France où toutes les rencontres sportives ont été reportées dans la foulée des attentats, dans d’autres disciplines que le football la décision a été prise de tout remettre en bloc sur l’ensemble du territoire comme le volley, le hockey sur glace ou le basket. Le football a donc été touché principalement en coupe de France puisque la Ligue 1 était au repos dans le cadre de la trêve internationale, la Ligue 2 faisant son apparition en rejoignant les clubs de National, CFA, CFA2 et les quelques clubs de Ligue ou de district ayant réussi l’exploit de se hisser au 7ème tour. La décision de disputer les rencontres de championnat des divisions inférieures par les équipes n’étant plus en course pour la coupe de France a été assortie du choix de respecter une minute de silence avant le début de chaque rencontre ce qui a permis à des milliers de footballeurs de rendre hommage aux victimes de ce carnage. Mais cela a également permis de montrer un élan de solidarité sur toutes les pelouses où il n’y avait pas que des Français et ce fut une minute de silence multiraciale à laquelle on a pu assister, une sorte de Blacks, Blancs, Beurs comme en 1998. C’était peut-être aussi une façon de ne pas céder à la psychose et de montrer que la vie continue…
Pourquoi remettre ?
Si les rencontres ont été remises dans certains cas il faut aussi en comprendre les raisons. Aujourd’hui plus on monte dans la hiérarchie du football, plus les moyens de sécurité mis en place sont importants et ce même dans une situation normale et non « de guerre » comme elle l’a été décrété dans le pays. C’est malheureusement comme ça et chaque week-end nombreuses sont les compagnies des forces de l’ordre qui sont déployées au tour des stades. Peut-être aussi la faute au football et à toutes ces dérives que l’on peut constater au tour du rectangles vert. Si la présence des uniformes n’était pas devenue une habitude, et une nécessité, aux abords des stades les matchs remis le week-end dernier ne l’aurait pas été puisque c’est bien de cela qu’il s’agit et non d’une mesure de deuil national ou d’hommage aux victimes. La vérité est que la priorité était ailleurs et que devant le manque de moyens humains il a fallu dépêcher les compagnies qui auraient du patrouiller aux abords des stades vers des points hautement plus stratégiques et importants pour la sécurité du pays. Je compare aussi ces décisions prises par les préfets respectifs aux alertes oranges de météo France, de nos jours plus personne ne voulant prendre de risques faute d’être responsable de ce qui pourrait advenir. Et si la situation est en partie rétablie avec une reprogrammation de l’ensemble des rencontres remises elle est néanmoins conditionnée à l’obligation des supporters visiteurs de ne pas se déplacer et de rester chez eux ceux qui ne manque pas, évidemment, de faire grincer des dents.
Les conséquences
Les conséquences sportives ne seront pas importantes puisque nous avons la chance que les rencontres peuvent se jouer immédiatement dans la continuité des reports la coupe de France étant prioritaire sur le championnat. Même s’il a fallu procéder, par ricochets, à de nouveaux reports des rencontres programmées initialement ce week-end, une partie d’entre elles concernant les équipes de Ligue 2 se dérouleront déjà la semaine prochaine et n’impacteront pas la suite du calendrier. Par contre il y aura une autre conséquence qui est économique puisque les déplacements des clubs de supporters génèrent du chiffre d’affaires pour les autocaristes ainsi que dans les stades avec les billets d’entrée et les consommations aux buvettes. Et en parlant de supporters, vu cette mesure d’interdiction de déplacement qui les frappe, le match de hier soir entre Sochaux et Strasbourg n’avait rien à voir avec celui du 8ème tour de la saison dernière ou les Alsaciens avaient fait le court voyage en nombre et avaient largement contribué à l’ambiance du stade Bonal en soutenant de bout en bout leurs favoris. Voici sans doute une troisième conséquence et non des moindres, l’ambiance qui baissera dans les stades avec l’absence des supporters visiteurs qui respecteront cet arrêté du 18 novembre 2015 portant interdiction de déplacement des supporters de clubs de football lors de la 15e journée de championnat de Ligue 2 et des matchs du 7ème tour de la coupe de France.
Ces attentats aveugles ont également eu pour effet un élan de solidarité nationale qui envahi tout le pays et le football y participe activement avec la Marseillaise qui sera entonné dans les stades de France lors des rencontres de Ligue et Ligue 2 ou de coupe de France comme lors du match d’hier soir à Bonal entre Strasbourg et Sochaux. Même la série A Italienne et la Premier League Anglaise nous emboîterons le pas dans la continuité d’Angleterre / France de mardi ou tout Wembley a chanté l’hymne Française écrite à… Strasbourg par Rouget de Lisle en avril 1792. La Marseillaise résonnera donc dans tous les stades ce week-end sauf en Corse, une Corse qui bafouera une fois de plus notre hymne ! Ce sera mon carton rouge du jour…